comme un dictionnaire

 

abstrait

À mes yeux, les termes « abstrait », « abstraction », « peinture abstraite » ont peu de sens dès lors qu’il s’agit de peinture posée sur un support : la toile, le papier, l’objet qui accueille la peinture est par nature concret, réel, palpable.

« Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse ! »

Les sentiments, les émotions, les pensées que la peinture peut générer dans nos cœurs, nos âmes, nos esprits sont bien plus grands que la peinture elle-même.

Certes, mais ne négligeons pas l’impact du support sur la perception de ce que nous nommons abstrait.

Et puis, dans les formes que je peins, il y a des personnes, des animaux, des végétaux, des signes, des nombres ou, pour le moins, des figures qu’on peut interpréter comme tels.

Alors, peinture abstraite ? Est-ce bien pertinent ?

À mes yeux, l’abstraction véritable est dans les nombres, ou mieux encore, les lois, les principes, les théorèmes qui les régentent.

La peinture est parfois un beau tremplin vers ces univers merveilleux.

âme

« La peinture est un art et l’art dans son ensemble n’est pas une vaine création d’objets qui se perdent dans le vide, mais une puissance qui a un but et doit servir à l’évolution et à l’affinement de l’âme humaine. »

Vassily Kandinsky, Du spirituel dans l'art et dans la peinture en particulier

beauté

« La beauté réside dans l’œil de celui qui regarde. »

Phrase citée par Oscar Wilde parmi tant d’autres.

Évidemment, être beau, être laid, ça n’a aucun sens : demandez-donc à un crapaud ce que c’est pour lui la beauté.

Rechercher la beauté, c’est rechercher l’autre, une forme d’idéal.

La peinture : un médium, un liant, un lien pour la beauté, la beauté qui nous rend meilleur ?

Tremplin vers le sublime ?

Les peintres parlent peu de la beauté. Peut-être par pudeur n’osent-ils pas envisager d’atteindre la grâce, cet état où beauté et bonté ne font qu’un ?

blanc

Le blanc est bien plus que la somme de toutes les couleurs.

C’est l’orchestre en fortississimo paré d’une infinité de nuances.

La puissance, parfois même la violence, et une multitude de variations, d’éclats, d’ombres aussi, subtile délicatesse et tendresse en même temps : big band et big bang !

 

bonheur

« Il ne faut pas avoir peur du bonheur, c'est seulement un bon moment à passer. »
Romain Gary

Peindre, c’est un vrai bonheur. Pourrai(s)-je le partager ?

carrés magiques

La beauté des carrés magiques se trouve et se découvre aussi dans leur structure numérique.

Au premier regard, les nombres semblent dispersés au hasard, par le hasard.

Cependant, ils rayonnent et nous irradient de leurs énergies propres, individuellement mais aussi dans leur totalité.

Individuellement, chaque nombre nous parle à sa manière. Nous l’entendons, nous le voyons, nous le ressentons selon notre histoire, notre expérience, notre vécu, notre sensibilité, notre relation aux nombres.

Ensemble, ces énergies s’additionnent et peuvent aussi bien se neutraliser que s’amplifier les unes les autres. Et c’est là où leur structure joue tout son rôle.

Prenons l’exemple du carré magique d’ordre 6 : il est composé des 36 premiers nombres (de 1 à 36) répartis sur 6 lignes et 6 colonnes de telle sorte que les sommes des nombres de chaque ligne et de chaque colonne et des deux diagonales soient identiques. Cette somme est appelée constante magique, c’est une sorte de signature du carré. Pour le carré d’ordre 6, elle vaut 111.

Il existe de nombreuses méthodes pour générer des répartitions de nombres qui rendent un carré magique, y compris à partir d’autres nombres que les 36 premiers, par exemple avec des nombres pairs seulement ou des impairs seulement.

En premier lieu, la qualité des signes, des nombres en l’occurrence, leurs formes, couleurs, matières et le sens qu’on veut bien leur attribuer, influencent notre perception. Ensuite, de toute évidence, un carré d’ordre 5, contenant donc 25 signes, ne fonctionne pas visuellement de la même façon qu’un carré d’ordre 6 avec ses 36 signes : géométrie oblige ! Mais, bien plus encore, l’organisation de ces signes entre eux apporte une autre dimension, une autre géométrie, une autre beauté. La constante magique qui relie les lignes, les colonnes et les diagonales du carré magique lui confère une cohérence et une puissance analogue à celles d’un rayon laser comparé à la lumière ambiante diffuse.

Sortons du carré, échappons-nous du visible pour envisager cette puissance d’un autre ordre, sorte d’aura qui enveloppe le tableau, que nous percevons et qui doit bien agir d’une manière ou d’une autre. C’est sans doute ces pouvoirs que les traditions invoquaient en utilisant des carrés magiques comme talismans.

dentifrice

Pour moi, le plus pénible avec la peinture c’est quand, après une journée pleine, il faut encore ouvrir un tube de dentifrice.

élégance

L’élégance, c’est esquisser un mouvement, un regard, et laisser le spectateur poursuivre ce qui deviendra son œuvre.

C’est aussi une forme de délicatesse.

En mathématique, l’élégance c’est une démonstration qui va droit au but sans s’embarrasser de détails inutiles : l’intuition fulgurante, la simplicité créatrice sans a priori.

Quelles peintures pouvez-vous qualifier d’élégantes ?

émotions

Paraphrasant Sacha Guitry, je dirais volontiers que je suis contre les émotions, tout contre.

Je ne considère pas la recherche de l’émotion comme un but artistique en soi.

Évidemment, pour nombre d’artistes, aussi bien plasticiens que musiciens, comédiens et autres acrobates, générer des émotions chez son public est une belle réussite, sinon un bel objectif.

Et l’activité artistique est elle-même génératrice d’émotions si intenses que nombre d’artistes, tout comme des sportifs et tant d’autres encore, recherchent ce stress et ces montées d’adrénaline à un point tel que ces plaisirs éphémères deviennent au final des drogues redoutables. Et d’ailleurs, ne devrais-je pas plaider coupable parfois, encore ?

Aujourd’hui, je ne vois pas la recherche de l’émotion comme un aboutissement mais plutôt comme une étape intermédiaire, une porte entre-ouverte vers autre chose, vers un état différent, supérieur certainement. Je ne sais pas bien définir ni qualifier cet état secret, multiple, bien plus complexe et complet qu’un concept purement intellectuel.

Plus encore, l’émotion m’apparaît de plus en plus comme un frein à cette quête d’au-delà.

Ses formes sont multiples, variables, incontrôlables, aléatoires dans le temps et selon les personnes, pas facile d’y échapper.

Peindre s’avère être la meilleure réponse à ces questions qui me dépassent.

essayons

« C’est impossible, dit la Fierté,
C’est risqué, dit l’Expérience,
C’est sans issue, dit la Raison,
Essayons, murmure le Cœur. »

William Arthur Ward

éternité

Peindre pour une éternité.

Au-delà du Temps : c’est un défi, un combat pour échapper à notre condition humaine, à la mort certainement.

Voyez ce que nous disent les peintures des hommes de la préhistoire.

Peindre : effleurer l’éternel ?

impressions

Le nom de cette série de peintures fait référence au tableau de Claude Monet « impression, soleil levant » peint il y a près de 150 ans et à l’origine du nom impressionnisme.

On y retrouve effectivement certaines valeurs défendues par ce mouvement – vitesse d’exécution, capture de l’instant présent, place de la lumière et variabilité de la couleur – même si l’aspect visuel semble au final (heureusement ?) assez éloigné de l’esthétique impressionniste.

Le nom fait aussi référence à des techniques d’imprimerie que j’ai adaptées et mises au point pour différents supports, y compris le papier, évidemment.

instant

L’instant c’est le Un qui se tend.

C’est aussi le temps du Un.

J’aime capter l’énergie de l’instant présent.

Comme un instantané - un instant né -, la peinture concentre et conserve cette énergie.

Elle la restitue à l’infini.

Le temps n’est plus, mais remplit l’espace : transfiguration.

Poussière de temps pour une éternité ?

magie

Peintre, je crée des images, certes, mais un peu plus aussi, parfois.

Ce que nous retenons, c’est bien l’image de la peinture, l’image que la peinture imprime dans notre esprit à travers nos yeux et nos regards.

Mais allons plus loin : déplaçons le i d’image et c’est la magie, l’âme qui agit.

Image et magie partagent les mêmes lettres : même famille, même sang, même puissance ?

Action de l’image ou bien image en action : imagination ?

mots

« Ce qui échappe aux mots, ce qui se trouve au plus obscur, au plus secret d'une peinture, c'est cela qui m'intéresse. »

Pierre Soulages

Oui, cent fois Oui !

Ce qui se trouve au plus lumineux, ce n’est pas mal aussi, n’est-ce pas ?

Et c’est au plus secret de la peinture aussi !

précision

« Qui veut faire de grandes choses doit penser profondément aux détails. »

Paul Valéry

proposition

Un tableau, c’est une proposition : donner à voir.

sprint

J’aime peindre comme on court un 100 mètres.

Des mois, des années de préparation et d’entraînement.

Juste avant la course : repérage, préparation, concentration.

Pendant la course, on ne pense pas, on n’a pas le temps. Le mental s’efface devant l’instinct qui reprend (prend ?) toute sa place.

La puissance doit s’exprimer en direct. Il faut libérer les énergies, toutes les énergies.

transparences

Que voilent et dévoilent ces transparences ?

Cette série de peintures sur plexiglas propose un jeu entre reflets et percées.

Le support est plus ou moins pur, transparent, réfléchissant, déformant, déformé parfois comme ce monde.

Il absorbe plus ou moins de notre image qui, dispersée entre les interstices, devient matière et fond du tableau mais se mélange aussi à la peinture de façon plus délicate et plus subtile.

Support et peinture nous renvoient l’un et l’autre une partie de notre image, dans quel but ?

En même temps, la transparence du support, plus ou moins affirmée, nous transporte de l’autre côté du miroir, plus ou moins facilement, à travers notre image aussi, dans quel but ?

Flux et reflux, résistance et ouverture, passage où la peinture semble flotter dans l’air.

Sortir du cadre, de la peinture, pour aller où ?

C’est comme le ciel : on peut s’y perdre, on peut s’y retrouver aussi.

vide

Peindre pour donner un sens au vide, ou, tout du moins, à cet entre-deux qui va de la matière à l’esprit.

en guise d’introduction

« Les grandes personnes ont toujours besoin d’explications. » nous dit le petit Prince.

Alors voici quelques lignes - sans véritables explications - à lire en désordre avec beaucoup d’indulgence comme autant de tentatives d’éclairage de mes peintures, de mes intentions, de ma façon d’aborder la peinture, la vie.

Ainsi, mes tableaux apparaîtront peut-être comme un peu plus que de simples objets décoratifs, quoique…

Mes peintures se suffisent à elles-mêmes.

Elles relèvent d’un domaine différent de celui des mots.

Ces domaines parfois se chevauchent, s’opposent, se complètent ou s’ignorent. Qu’importe !

La vie n’est-elle pas plus belle que le vivant ?

Alors, que chacun y voie ce qu’il y voit, et c’est très bien ainsi.

Ceci dit, l’expérience montre que quelques mots s’avèrent parfois utiles pour orienter le regard, proposer une vision différente et générer un peu de nouveauté.

Ensuite, nos créations nous échappent et prennent leurs chemins propres, comme des enfants...